Eau-forte d'Auguste Brouet, imprimée par Vernant - 2ème état (EB 285).
R.R. Dobbelaere
serait honoré de votre visite
30 avenue de l'Opéra
Le choix de la police fut il inspiré par l'assonance nordique du nom ? Et d'ailleurs, qui est Dobbelaere ? Une autre carte, d'un tout autre style, nous l'indique. Elle représente, dans un intérieur sobre mais opulent - on notera par exemple le riche travail des croisillons de la fenêtre - un jeune homme qui plastronne dans un frac cossu, devant les yeux aussi approbateurs que satisfaits d'admirateurs de tous âges qui ne peuvent guère être que ses proches. Cette complaisance a une raison, qui est donnée par la légende : son premier costume vient de chez Dobbelaere
, ce couturier chic qui habille le tout Paris de l'entre-deux-guerres. Cette seconde planche est due au crayon, ou plutôt la pointe, de l'intéressant dessinateur Maurice Rétif (1887-1966[1]). Issu d'une famille d'industriels du Cher, fabricants de voitures d'abord hippo- puis automobiles, bien de luxe s'il en était, Rétif était à même de faire valoir la distinction et l'élégance d'un tailleur chic.
On doit donc certainement voir en la planche de Brouet un canular amusant. S'agit-il du réemploi d'un cuivre abandonné, ce qui expliquerait le soin d'abord apporté à cette planche, dont une épreuve de premier état nous suggère qu'elle fut aciérée ? S'agit-il d'une planche-gag exécutée sur commande ? L'origine de ce trait d'humour risque fort de nous rester longtemps inconnue. Mais on y verra sans difficulté un éclair de cette malice que Thomé se plut à rapporter[2] lorsqu'il nous fit le portrait de l'artiste, tout comme il apporte une touche supplémentaire au tableau des camaraderies d'artistes auxquelles on devine Brouet participer volontiers, et que nous décrirons dans un autre billet.